Replay Actualités Parkinson

L'expertise scientifique

Save The Date
Replay Actualités Parkinson
Save The Date

Les traitements de seconde ligne : au stade précoce des fluctuations de la maladie de Parkinson

En 2021, il est légitime pour tout patient parkinsonien d’avoir un niveau d’attente élevé du contrôle de la maladie de Parkinson (MP) qui le touche. Cela signifie, entre autres, le contrôle optimal des fluctuations motrices et non motrices et ce, dès le début de leur apparition. Comment positionner actuellement les traitements de seconde ligne à ce stade ?

Actuellement, il est classiquement admis que le neurologue peut, ou doit, proposer une alternative au traitement dopaminergique per os, à partir de cinq prises de lévodopa par jour, et/ou 2 heures de off par jour, et/ou 1 heure de dyskinésies gênantes par jour [1]. Quid de la qualité de vie d’un patient parkinsonien jeune, actif, pratiquant des loisirs, ayant un métier prenant, avec peut-être des enfants en bas âge, ou tout cela à la fois, qui a une akinésie de fin de dose sur sa main dominante ou des dyskinésies disgracieuses en réunion et une gélule indiscrète à prendre à 16 heures ? Dès lors, ce n’est pas le handicap objectif qu’il faut considérer, mais le retentissement fonctionnel.

Quelles sont les données de la littérature au stade précoce des fluctuations, soit dans les 3 premières années suivant le début des fluctuations motrices ? En dehors des troubles axiaux dopa-résistants et du déclin cognitif, quels indices orientent vers un choix de traitement de seconde ligne ?
Chez un patient fluctuant, une question simple confirme ou non l’intérêt de recourir à une solution de haute technicité : « Êtes-vous limité dans vos activités à cause des symptômes parkinsoniens, en d’autres termes, faites-vous tout ce que vous voulez dans la vie ? » Devant un grand tremblement, l’efficacité de la dopathérapie est connue pour être modeste ; doit-on attendre plusieurs années et une majoration progressive des traitements ?

La stimulation cérébrale profonde (SCP) précoce

Au cours des dernières années, de nouvelles indications ont peu à peu émergé. Elles concernent des sujets jeunes et en activité, dont le handicap moteur est moindre, afin de limiter le risque de retentissement socio-professionnel péjoratif lorsque la maladie évolue. Mais elles concernent également des sujets développant des effets secondaires psycho-comportementaux de traitements dopaminergiques.

Stimulation cérébrale profonde des noyaux sous-thalamiques

Dans l’étude EARLYSTIM [2], une SCP des noyaux sous-thalamiques (NST) était proposée à des patients parkinsoniens dopasensibles âgés de moins de 60 ans, évoluant depuis au moins 4 ans (en moyenne 7 ans), ayant des fluctuations motrices ou des dyskinésies datant de moins de 3 ans, avec un retentissement fonctionnel modéré. Leur qualité de vie était améliorée de 26 % en moyenne.

Qualité de vie améliorée

Ainsi, il a été démontré que la SCP du NST améliore la qualité de vie des patients lorsqu’ils sont opérés relativement tôt et ce, de façon supérieure au traitement oral standard.
D’autres résultats à 5 ans d’évolution ont été publiés en 2020 [3]. Les patients avaient un âge moyen de 60 ans, une MP évoluant en moyenne depuis 2 ans, un traitement médicamenteux depuis au moins 6 mois et moins de 4 ans, n’avaient pas de fluctuation ni de dyskinésie. À 5 ans d’évolution, il n’y avait pas de différence en On entre les deux groupes et le tremblement était moins sévère dans le groupe avec SCP. Les sujets étaient moins polymédiqués dans le groupe SCP et avaient une quantité de traitement dopaminergique moins importante. Enfin, il y avait moins de dyskinésies et, si celles-ci étaient présentes, elles étaient moins sévères dans le groupe SCP.

Limites

À l’inverse de ces résultats encourageants, la qualité de vie n’apparaissait pas significativement améliorée dans l’étude de Mallory et al. (échelle PDQ39). Le nombre de patients inclus (28 pour Mallory et al.) invite à la prudence et à la nécessité d’études prospectives à plus grande échelle. Il n’est pas mentionné la recherche d’une apathie post-opératoire. Or celle-ci est fréquente après SCP des NST et on connaît la difficulté à trouver le bon équilibre entre apathie et comportement hyperdopaminergique en post-opératoire [4]. Dans l’étude EARLYSTIM, les deux groupes de patients s’aggravaient sur le plan de l’apathie, sans différence significative, mais avec une tendance en défaveur du groupe SCP. Que devient un patient jeune, en pleine activité professionnelle et avec une vie de famille et sociale intense, lorsqu’il est apathique ? Deux patients se sont suicidés dans le groupe stimulation, la dépression était plus fréquente. Les complications opératoires sont survenues chez 17,7 % des patients. Doit-on faire prendre un risque chirurgical et comportemental, ne serait-ce que minime, à un patient qui va bien ?
Cette technique exige des critères de sélection stricts et reste invasive et définitive. Dans un cas de réflexion de stimulation au stade précoce des fluctuations motrices, il semble capital de respecter un délai au moins supérieur à 5 ans d’évolution de la maladie pour se préserver d’une erreur diagnostique. Notamment vis-à-vis des autres syndromes parkinsoniens, et plus particulièrement les atrophies multisystématisées en raison de leur dopasensibilité possible (trois cas de la cohorte EARLYSTIM) [5].

SCP du noyau VIM du thalamus

Celle-ci pourrait s’envisager à un stade précoce. Mais comment définir un stade précoce dans une MP de forme principalement tremblante, sachant que le tremblement est en général doparésistant – par convention, il convient donc de majorer progressivement les posologies jusqu’à 1 g de lévodopa par jour – et qu’il convient d’attendre un nombre d’années suffisant (3 à 5 ans ?) avant de considérer que le tremblement va rester isolé ?

SCP des GPi

Aucune étude ne discute la place de la SCP des globus pallidus internes (GPi) au stade précoce des fluctuations, cette stimulation permettant principalement une diminution de dyskinésies invalidantes. La question du risque chirurgical est la même que dans la SCP des NST.

La pompe à apomorphine sous-cutanée (SC)

Une étude sur 22 patients vient tout juste d’être publiée ; elle concerne des patients âgés de moins de 71 ans présentant des fluctuations motrices ou des dyskinésies évoluant depuis moins de 3 ans ayant bénéficié de la mise en place d’une pompe à apomorphine et évalués à 6 mois. On observe une amélioration significative du temps de off, des signes non moteurs (notamment apathie et qualité du sommeil), une absence d’aggravation des dyskinésies et des performances cognitives [6].
L’étude en cours EARLYPUMP vise à évaluer l’effet sur la qualité de vie de la pompe à apomorphine en comparaison au traitement oral conventionnel optimisé, à un stade précoce de la MP, alors que les complications motrices commencent juste à se développer. Cette dernière vise des patients de moins de 65 ans ayant une MP évoluant depuis plus de 4 ans, mais avec des fluctuations et/ou dyskinésies depuis moins de 3 ans.
L’instauration d’une pompe à apomorphine est décidée en premier critère sur des fluctuations motrices. Cependant, il est important de garder à l’esprit que, pour un tiers des patients, les fluctuations non motrices sont plus gênantes que les fluctuations motrices, qu’elles entraînent un handicap plus sévère [7] et qu’un petit nombre de patients au stade précoce de fluctuations non motrices ne présente pas encore de fluctuation motrice, comme c’est le cas dans 1,4 % des cas d’une série coréenne [8]. L’apomorphine semble avoir un profil intéressant dans le traitement des fluctuations non motrices [9] et trouvera peut-être une place dans le traitement de patients parkinsoniens avec certains types de fluctuations non motrices (apathie, humeur) au premier plan.

L’infusion continue gastro-jéjunale de lévodopa-carbidopa par pompe à Duodopa®

Techniquement, il est tout à fait envisageable de mettre en place un traitement par infusion gastro-jéjunale de lévodopa-carbidopa (Duodopa®) à un patient au stade précoce des fluctuations motrices. Cependant, compte tenu de la taille du dispositif (19 x 8,5 x 3,4 cm), de son poids (500 g avec une cassette pleine) et de son aspect relativement disgracieux, aucune étude n’est actuellement réalisée ou envisagée pour traiter un patient parkinsonien au stade précoce des fluctuations.

Conclusion

Il semble opportun de s’interroger sur l’instauration d’une pompe à apomorphine au stade précoce des fluctuations motrices et/ou non motrices. Les résultats de l’étude EARLYPUMP permettront de préciser cette question.

L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêt.

Bibliographie

1. Odin P, Chaudhuri KR, Slevin JT et al. Collective physician perspectives on non-oral medication approaches for the management of clinically relevant unresolved issues in Parkinson’s disease: Consensus from an international survey and discussion program. Parkinsonism Relat Disord 2015 ; 21 : 1133-44.
2. Schuepbach WMM, Rau J, Knudsen K et al. Neurostimulation for Parkinson’s Disease with Early Motor Complications. N Engl J Med 2013 ; 368 : 610-22.
3. Hacker ML, Turchan M, Heusinkveld L et al. Deep Brain Stimulation in Early-Stage Parkinson’s Disease: Five Year Outcomes. Neurology 2020 ; 95 : e393-e401.
4. Zoon TJC, van Rooijen G, Balm GMFC et al. Apathy Induced by Subthalamic Nucleus Deep Brain Stimulation in Parkinson’s Disease: A Meta-Analysis. Mov Disord 2021 ; 36 : 317-26.
5. Kim HJ, Jeon B. Decision under risk: Argument against early deep brain stimulation in Parkinson’s disease. Parkinsonism Relat Disord 2019 ; 69 : 7-10.
6. Fernandez-Pajarin G, Sesar A, Martin IJ et al. Continuous subcutaneous apomorphine infusion in the early phase of advanced Parkinson’s disease: A prospective study of 22 patients ; Clin Park Relat Dis 2022 ; 6.
7. Witjas T, Kaphan E, Azulay JP et al. Nonmotor fluctuations in Parkinson’s disease: Frequent and disabling. Neurology 2002 ; 59 : 408-13.
8. Kim A, Kim HJ, Shin CW et al. Emergence of non-motor fluctuations with reference to motor fluctuations in Parkinson’s disease. Parkinsonism Relat Disord 2018 ; 54 : 79-83.
9. Todorova A, Chaudhuri KR. Subcutaneous apomorphine and non-motor symptoms in Parkinson’s disease. Parkinsonism Relat Disord 2013 ; 19 : 1073-8.