Replay Actualités Parkinson

L'expertise scientifique

Save The Date
Replay Actualités Parkinson
Save The Date

L’importance de la séquence théra­peutique dans la SEP à travers la méthodologie des cas vignettes

La sclérose en plaques (SEP) est une maladie évolutive et potentiellement invalidante qui façonne profondément le quotidien des patients sur plusieurs décennies [1]. Son expression clinique est hétérogène, rendant chaque parcours unique. Cette variabilité complexifie la mise en place d’une stratégie thérapeutique structurée et efficace, soulevant une question essentielle : comment assurer à chaque patient un parcours de soins optimisé, lui offrant les meilleures chances de contrôle de la maladie et de maintien de son autonomie ?
En France, avons-nous aujourd’hui une approche homogène et optimisée pour répondre à ce défi ? Existe-t-il un cadre de référence clair, ou sommes-nous encore confrontés à des décisions thérapeutiques hétérogènes, plus que par une vision à long terme ?

Les patients SEP sont souvent diagnostiqués jeunes et vivront avec la maladie pendant plusieurs décennies au fil des grandes étapes de leur vie. Dans ce cadre, une approche thérapeutique unique ne peut suffire. La notion de séquence thérapeutique s’impose : elle invite à anticiper les trajectoires, à planifier les transitions et à aligner les choix thérapeutiques avec les évolutions de la maladie comme avec les projets de vie du patient.

Validée par la HAS [2], la méthodologie des cas vignettes analyse les pratiques cliniques en conditions réelles, et a ainsi été utilisée pour mieux comprendre les stratégies thérapeutiques sur le long terme. Contrairement aux simples analyses de prescription, cette approche capture la complexité des décisions médicales en intégrant contexte clinique, contraintes individuelles et préférences des patients.

Les stratégies thérapeutiques varient selon les profils des patients et l’évolution de leur maladie. Cette étude a analysé six profils types [3].
Cas 1, 2 et 3 : patients naïfs nécessitant une initiation thérapeutique.
Cas 4 et 5 : patients en switch d’une thérapie plateforme, nécessitant un nouveau traitement.
Cas 6 : patient en switch d’un traitement de haute efficacité, nécessitant un nouveau traitement.

Quelle est la méthodologie de l’étude ?

Le parcours d’un patient SEP est rarement linéaire. Les événements cliniques, la tolérance aux traitements et les attentes du patient façonnent l’évolution de la prise en charge.
L’étude repose sur un suivi en trois étapes clés :
Choix 1 – Décision initiale – 1er choix thérapeutique
Choix 2 et 3 – Apparition d’un événement perturbateur – 2e et 3e  choix thérapeutiques
Chaque neurologue est confronté à ces décisions successives qui structurent la séquence thérapeutique et permettent d’individualiser la prise en charge.

Deux approches d’initiation du traitement coexistent dans la SEP : l’escalade thérapeutique, qui commence par un traitement plateforme avant d’intensifier si nécessaire, et l’initiation précoce d’un traitement de haute efficacité, visant un contrôle rapide de l’inflammation pour prévenir le handicap.
L’étude met en évidence un point clé : les patients pris en charge d’emblée par un traitement de haute efficacité présentent un risque significativement réduit de progression du handicap. Attendre avant d’intensifier pourrait compromettre la préservation des fonctions neurologiques sur le long terme. Ces résultats appuient une approche plus proactive, surtout aux stades précoces de la maladie.

Deux stratégies se distinguent une fois un traitement de haute efficacité initié :
les traitements d’immunosuppression continue assurent un contrôle de la maladie tant qu’ils sont maintenus. Cependant, cette immunosuppression persistante augmente le risque d’infections, nécessitant une surveillance adaptée [4] ;
les traitements de reconstitution immunitaire (IRT) assurent un contrôle de la maladie en évitant une immunosuppression prolongée.
Le choix entre ces deux approches ne dépend pas seulement de leur efficacité immédiate, mais aussi de leur impact à long terme. En effet, certains traitements modifient durablement le système immunitaire, influençant les options futures et le profil de sécurité des traitements suivants [5]. Faut-il alors privilégier un contrôle continu ou une approche plus flexible sans immunosuppression ? Un enjeu central pour ajuster la trajectoire thérapeutique.

Que nous enseigne l’étude de ce cas ?

Mathilde, 31 ans, présente un premier événement démyélinisant très actif dans un contexte de projet de grossesse. Son statut JC+ (> 3) exclut d’emblée le natalizumab. Les modulateurs S1P ont été peu retenus, probablement en raison du risque de rebond à l’arrêt du traitement, un enjeu crucial dans une perspective de grossesse.
Il était essentiel de lui proposer un traitement efficace rapidement, tout en préservant ses perspectives futures d’une grossesse. Ainsi, 70 % des neurologues privilégient une stratégie de haute efficacité d’emblée par anti-CD20 (40,7 %) ou IRT (30,9 %). Le quart restant préférant une approche progressive via un traitement plateforme.
Le choix se cristallise donc entre une immunosuppression continue avec un anti-CD20 ou une induction séquentielle avec un IRT, offrant une reconstitution immunitaire et la possibilité d’éviter un traitement au long cours. Un choix stratégique qui doit concilier efficacité, tolérance et perspectives à long terme.

Que nous enseigne l’étude de ce cas ?

Aurélie, 42 ans, vit avec une SEP depuis plusieurs années et a déjà changé de traitement à deux reprises. Actuellement sous plateforme orale depuis 4 ans, sa maladie reste active avec l’apparition de nouvelles lésions à l’IRM et une activité clinique.
Son statut JC + (> 2) exclut d’emblée le natalizumab. Et, face à cette progression sous traitement, 80 % des neurologues privilégient une stratégie de haute efficacité. 34,3 % des neurologues choisissent une forme orale avec un IRT et 47,8 % optent pour un anti-CD20.
Ces choix traduisent un consensus : en présence d’une maladie active sous traitement plateforme, l’intensification thérapeutique devient essentielle pour contrôler la maladie.

Ces résultats mettent en évidence une hétérogénéité des séquences thérapeutiques dans la prise en charge des patients SEP-R en France, soulignant l’absence de consensus clair. Cette variabilité reflète l’importance d’une structuration optimisée des parcours de soins, afin d’assurer aux patients une prise en charge adaptée à l’évolution de leur maladie.
Dans ce contexte, l’IRT apparaît comme l’un des choix stratégiques pour les patients SEP-R de par son efficacité, son profil de tolérance, et son immunosuppression transitoire. Sa capacité à restaurer l’immunocompétence permettrait ainsi de retarder, voire d’éviter, le recours à une immunosuppression continue.

Bibliographie

1. Dobson R, Giovannoni G. Multiple sclerosis – a review. Eur J Neurol 2019 ; 26 : 27-40.
2. Haute Autorité de santé. Méthodes quantitatives pour évaluer les interventions visant à améliorer les pratiques. Saint-Denis La Plaine 2007.
3. Vermersch P, Moisset X, Roux B et al. Long-Term Management and Therapeutic Sequencing for Patients with Relapsing Multiple Sclerosis in France: A Vignette Study. Neurol Ther 2025.
4. Jacober SLS, Disanto G, Sacco R et al. Interplay between age and disease-modifying treatments in influencing infection risk in multiple sclerosis. Mult Scler Dec 2023 ; 29 : 1765-75.
5. Pardo G, Jones DE. The sequence of disease-modifying therapies in relapsing multiple sclerosis: safety and immunologic considerations. J Neurol Dec 2017 ; 264 : 2375-7.