Résumé
La cognition sociale est le domaine cognitif intégrant des fonctions cognitives majoritairement tournées vers les interactions sociales et le comportement en société. Elle est dépendante de réseaux cérébraux étendus, dont les dysfonctions sont fréquentes en cas de maladie du cerveau. Ainsi, les troubles de la cognition sociale sont retrouvés dans la plupart des maladies neurodégénératives, toutefois à des degrés de sévérité variable. Ils entraînent une diversité de comportements anormaux (désinhibition, perte des convenances, manque d’empathie…) fréquemment observés ou rapportés par les familles. De nombreux tests ont été validés en langue française pour l’évaluation subjective ou objective de la cognition sociale. Pourtant, et notamment en France, elle reste fréquemment négligée en neurologie lors de l’évaluation clinique malgré sa contribution au diagnostic, au diagnostic différentiel et au suivi des maladies neurodégénératives.
Abstract: Social cognition in neurodegenerative diseases
Social cognition refers to the cognitive domain encompassing cognitive processes mostly dedicated to social interactions and social behavior. It depends on widely spread neural networks, whose frequent dysfunctions can be observed in neurodegenerative diseases, leading to a diversity of abnormal behaviors that can be frequently observed or reported by patients’ relatives (disinhibition, loss of manners, lack of empathy…). Deficits of social cognition are retrieved in most of neurodegenerative diseases, although being of variable severity. Validated tests in French are available for its subjective or objective assessment. However, notably in France, social cognition remains frequently neglected in neurology during the clinical evaluation, despite its contribution regarding the diagnosis, differential diagnosis and follow-up of neurodegenerative diseases.
Cognition sociale
Comprendre les autres et inter-agir avec elles et eux de manière efficiente implique le fonctionnement d’une multitude de processus cognitifs en interaction dynamique. On regroupe les processus qui semblent préférentiellement engagés dans les analyses ou interactions sociales sous le terme de « cognition sociale ». En nous permettant de percevoir, de traiter et d’interpréter les informations sociales, la cognition sociale (CS) nous amène à nous représenter les autres personnes ainsi que les groupes ou contextes sociaux, et de nous ajuster à eux.
Si l’on considère les différents champs d’étude qui s’intéressent à la CS, plusieurs approches peuvent se distinguer sur le plan théorique [1], les deux approches principales étant issues de la psychologie sociale, puis des neurosciences cognitives. Premièrement, la psychologie sociale, pionnière du domaine, considère en général la CS comme étant une cognition contextualisée socialement. Plus précisément, la cognition devient sociale quand il y a interaction sociale. Ainsi formulée, cette approche prône que tous les processus cognitifs (mémoire, analyse visuo-spatiale…) peuvent être « sociaux » lorsque le contexte le requiert. La deuxième approche est issue des neurosciences cognitives. Elle postule d’abord l’existence de processus cognitifs spécifiquement mobilisés lors d’interactions sociales, sous-tendus par des réseaux cérébraux spécialisés. Ces deux approches sont difficilement conciliables, puisque l’une postule que la CS est une spécification de la cognition appliquée à un contexte social, tandis que l’autre l’envisage comme un ensemble de processus tournés exclusivement vers les interactions sociales [1].
Concilier ces deux approches semble voué à l’échec. Pourtant, toutes deux ont une utilité certaine. Si la première semble empiriquement soutenue par davantage de preuves, la deuxième, malgré ses errements, garde une pertinence évidente sur le plan clinique. En effet, l’approche neuroscientifique actuelle de la CS permet de délimiter précisément un domaine d’étude et d’évaluation clinique. En concevant qu’il existe un ensemble d’habiletés spécifiquement tournées vers la sphère sociale, cette approche est utile pour la recherche, en nous indiquant ce qu’il faut étudier et mieux comprendre. Elle est surtout utile pour la clinique, en nous précisant ce qu’il faut évaluer en pratique. C’est dans cette perspective que la dernière édition du DSM-5 a intégré la CS comme l’un des six domaines principaux de la cognition à évaluer en pratique psychologique et médicale.
Fonctions clés de la cognition sociale (Tab. 1)
Même en nous référant à cette approche neuroscientifique de la CS, elle reste un domaine riche de processus. Dans la littérature se distinguent souvent des processus dits de « bas niveau », tels que la perception du mouvement corporel, de la direction du regard, de la fréquence vocale… et des processus dits de « haut niveau », comme les jugements moraux, l’attribution de stéréotypes, l’inférence mentale… Les fonctions cognitives les plus élaborées théoriquement et les plus étudiées sur le plan clinique seront décrites dans les lignes suivantes.
Mentalisation et empathie
Un aspect essentiel de la CS est l’habileté à prédire les états mentaux d’autrui. Ces prédictions, fondées entre autres sur les expériences antérieures personnelles et l’analyse du contexte, sont une inférence de ce que les autres perçoivent, pensent, savent, ressentent, croient, veulent, etc. La capacité à établir ces inférences est nommée mentalisation ou théorie de l’esprit [2]. Celle-ci est déterminante dans nos interactions quotidiennes puisqu’elle nous permet de nous ajuster aux autres, tout comme les autres peuvent ainsi s’ajuster à nous, dans les situations les plus basiques (ex. je comprends qu’en me tendant un dossier, mon collègue souhaite que je le saisisse) ou élaborées (ex. je devine qu’en étant froid dans nos échanges, mon ami me reproche quelque chose). Ce co-ajustement social, permis par l’inférence des états mentaux amène parfois à ressentir un changement d’état affectif qui fait écho à celui d’autrui, une habileté qu’on nomme empathie. Toutefois, l’empathie est un concept aux multiples définitions [3] et force est de constater que cette réponse émotionnelle « en résonance » peut aussi diverger en intensité, en catégorie (e.g. tristesse, honte, embarras…) ou parfois en valence (plaisante ou déplaisante) de celle ressenti par un tiers.
Fonctionnement émotionnel
Ce terme rassemble un ensemble d’aptitudes se référant à l’expérience, l’expression, la perception et la conceptualisation des émotions [4]. Pour mieux comprendre ces différentes aptitudes, il faut préciser que les émotions ne sont plus envisagées dans la littérature scientifique moderne comme des processus biologiques dont les frontières sont distinctes et universelles, mais comme des états mentaux construits. Cela permet de mieux saisir le rôle constitutif que la mémoire des expériences passées et le langage jouent dans le ressenti et la perception des émotions.
• L’expression se réfère au comportement corporel, vocal et facial associé aux expériences émotionnelles.
• La perception (ou reconnaissance) implique la capacité à inférer – sur la base d’indices corporels, vocaux, faciaux, mais aussi langagiers et contextuels – les émotions des autres.
• Les connaissances émotionnelles sont des croyances ou connaissances que nous avons sur le fonctionnement des émotions ou sur les catégories émotionnelles (peur, tristesse, embarras, fierté…). Dans l’enfance, nous enrichissons ce stock avec l’âge et pouvons ainsi accéder à des émotions plus subtiles, à des associations contextuelles plus rapides, ou à la compréhension qu’une émotion exprimée n’est pas forcément ressentie.
• La réactivité renvoie à notre expérience émotionnelle, et aux variations intra-individuelle (contexte personnel) et interindividuelle de sensibilité, d’intensité ou de persistance.
• La régulation se réfère aux processus initiant, maintenant ou modulant l’occurrence, l’intensité ou l’expression des émotions.
Sémantique sociale
La lecture approfondie et optimale d’un contexte social requiert l’analyse du statut social d’une personne ou de la nature d’un groupe ou d’un environnement. Cette analyse étant souvent implicite et automatique, la littérature scientifique moderne envisage qu’elle dépende d’un stock mnésique particulier, qu’on peut nommer « sémantique sociale ». Plutôt que d’analyser précisément chaque personne, groupe ou environnement social de manière poussée, nous appliquons une heuristique (une analyse souvent juste) déterminée en fonction de nos connaissances sociales antérieures. Face à une situation sociale (ex. funérailles), il nous suffit alors de la catégoriser, comme nous catégoriserions un objet (ex. contexte sobre, solennel, triste), pour y naviguer de manière adaptée en appliquant des normes adéquates. Cet ensemble de connaissances (règles, normes, conventions…) est appris principalement pendant l’enfance et partagé par les groupes dans lesquels nous évoluons. Ces normes donnent alors un cadre d’action au sein de ce groupe sur ce qu’il convient de faire ou non, et sur les attentes de chacune et chacun. Ce cadre permet d’orienter non seulement nos actions, mais aussi notre prédiction des états mentaux des autres (ex. nous sommes à des funérailles, cette personne doit être triste). Parce qu’elles sont construites, ces connaissances peuvent être spécifiques à un groupe social, une région, une « culture » donnée. Les attentes découlant des normes de genre sont un bon exemple du caractère acquis de ces normes et de leur force à façonner nos comportements [5] : dans une vision binaire du genre, on favorisera par exemple l’expression des émotions chez les petites filles, mais pas chez les petits garçons, suivant le stéréotype que les premières sont plus émotives.
Pragmatique
La pragmatique est l’utilisation du langage dans les interactions sociales. Elle permet de comprendre et d’exprimer l’intention, de s’ajuster au contexte et à son interlocuteur ou interlocutrice, d’organiser l’information pour qu’elle soit intelligible, de maintenir une attention conjointe et sélective (au discours de l’autre), de comprendre ou d’exprimer l’implicite ou l’ambigu, et de faire appel aux connaissances partagées avec autrui. Le fait que la pragmatique ait été conceptualisée par les sciences du langage plus que par les sciences cognitives explique pourquoi il est difficile de dire là où la pragmatique débute et les autres fonctions s’arrêtent. De larges chevauchements existent donc avec les fonctions décrites plus haut, comme avec la mentalisation (compréhension d’intention, de sarcasmes), les connaissances émotionnelles (compréhension des émotions exprimées), ou la sémantique sociale (ajustement à l’autre).
Mécanismes de soutien
La notion de prédiction est au cœur des mécanismes cognitifs sociaux. Tout comme on ne peut percevoir directement l’état mental d’autrui, on ne reconnaît pas vraiment une émotion : on la prédit, sur la base de traits perçus, de nos connaissances antérieures, de l’analyse du contexte, etc. Avoir un comportement adapté dans une situation sociale dépend là encore de nos prédictions, fondées sur nos inférences (du contexte, des conséquences sociales de notre comportement, etc.) comme sur nos connaissances antérieures (comportement ayant été jugé adapté ou non par le passé). Anticiper une récompense sociale (du pouce bleu sur les réseaux sociaux à l’effet d’un article scientifique dans sa communauté), c’est encore la prédire. Ces mécanismes prédictifs ne sont cependant pas spécifiquement sociaux, puisqu’une large part de notre cognition serait caractérisée par cette notion [6].
L’intéroception est un autre mécanisme qui tiendrait un rôle prépondérant dans notre vie sociale et plus spécifiquement dans nos émotions. Cette capacité à évaluer et prédire notre activité physiologique et nos sensations corporelles serait impliquée lors des étapes préliminaires du ressenti émotionnel, ou de l’empathie [6]. Le fait de prendre en compte les renforçateurs positifs ou négatifs pour adapter notre comportement social implique là encore un système transversal clé de la cognition : la cognition affective [7]. La poursuite de récompenses sociales (validation, attractivité, approbation, acceptation, reconnaissance, réciprocité…), qui nous renforcent positivement, tout comme, à l’opposé, l’évitement des punitions sociales (rejet, stigmatisation…) modulent notre comportement de manière significative. Le contrôle cognitif et l’inhibition sont encore des mécanismes transversaux qui ont un rôle essentiel dans notre CS [8]. En coordonnant inhibition, mémoire de travail, flexibilité et/ou renversement, le contrôle cognitif assure un ajustement continu de notre cognition en fonction d’une analyse de l’environnement interne (e.g. nos intentions) et externe (e.g. environnement social).
Évaluer la cognition sociale en pratique clinique
Qu’il s’agisse de quantifier et caractériser les troubles cognitifs des patients, d’orienter leur diagnostic clinique ou d’éprouver une efficacité thérapeutique, les raisons d’évaluer la CS sont multiples et évidentes. Elles sont en outre appuyées par le DSM-5 qui prône son évaluation en cas de suspicion de maladies cognitives, au même titre que celle des cinq autres domaines cognitifs principaux.
Inventaires et échelles de comportement
L’utilisation d’inventaires ou d’échelles de comportement permet d’identifier les troubles les plus saillants (ex. désintérêt social, repli, inconvenances sociales, manque d’empathie…). Cependant, une altération comportementale peut avoir une origine cognitive multiple (e.g. c’est le cas de la « désinhibition »). L’évaluation de la CS par ces échelles n’est donc pas garantie. Par ailleurs, les échelles comportementales sont soumises à des biais difficiles à contrôler : comme la sous-estimation des troubles par les patients, ou leur surestimation par leurs proches. Néanmoins, ils permettent souvent d’avoir un premier aperçu de ce qui pourrait relever d’une altération de la CS. Parmi les échelles disponibles en français, on peut citer l’échelle DAPHNE [9], qui a été conçue pour reprendre les critères comportementaux de la variante comportementale de la dégénérescence frontotemporale (DFTc) et qui permet notamment une bonne discrimination avec la maladie d’Alzheimer (MA) typique. La Frontal Behavioral Inventory (FBI), là encore développée à partir des troubles observés dans la DFTc, est un inventaire qui permet une lecture large de la désinhibition comportementale. L’échelle de dysfonctionnement frontal (EDF) est une échelle rapide développée pour orienter vers un diagnostic de DFTc. La Frontal System Behavior Scale (FrSBe) se focalise sur l’apathie, la désinhibition et les dysfonctions exécutives en contrastant une observation prémorbide avec celle des troubles récents. La Cambridge Behavioural Inventory (CBI) envisage le comportement dans une acception plus large (e.g. humeur, orientation, habitudes alimentaires, sommeil…), mais concerne toujours davantage la DFTc et la MA. L’évaluation comportementale dans la maladie de Parkinson (ECMP) [10] permet un inventaire du comportement très fin, sensible aux syndromes hyper et hypodopaminergiques de la maladie de Parkinson. D’autres échelles sont bien évidemment disponibles, mais la place donnée aux comportement sociaux ou à la conséquence d’un potentiel trouble de CS y est moindre. Concernant les échelles plus spécifiquement tournées vers la CS, on peut citer l’Interpersonal Reactivity Index (IRI) et l’Empathy Quotient (EQ) qui évaluent différentes dimensions de l’empathie.
Outils de mesure objective
Les outils de mesure objective, c’est-à-dire fondés sur la performance des patients, permettent une évaluation plus directe, et moins biaisée par l’anosognosie. Ces outils sont l’apanage des neuropsychologues et, parfois, des orthophonistes. Sur la figure 1 sont listés les tests neuropsychologiques les plus utilisés en France par les neuropsychologues pour évaluer la CS en neurologie et gériatrie [11]. On peut voir que la mini-SEA (Social cognition & Emotional Assessment) est la batterie la plus utilisée dans ce but. Celle-ci permet l’évaluation de la mentalisation, de la compréhension de situations sociales et de la perception des émotions via un raccourcissement et la modification de deux des tests les plus utilisés à l’international [12]. On retrouve également ces deux tests dans ce classement : le test des faux pas et le Pictures of Facial Affect (ou « visages d’Ekman »). Les épreuves de théorie de l’esprit évaluent la compréhension des causes et conséquences des émotions. Le Tom-15 évalue la mentalisation par le paradigme de fausses croyances (reposant sur l’inférence de l’état mental d’un personnage possédant une croyance erronée et non conforme à la réalité).
Figure 1 – Batteries et tests de cognition sociale les plus utilisés en France par les neuropsychologues en neurologie et gériatrie, en pourcentage d’utilisation journalière, fréquente (plusieurs fois par semaine), occasionnelle (plusieurs fois par mois), rare (plusieurs fois par année) ou nulle. Note : les pourcentages d’utilisation du test des faux pas et du Pictures of Facial Affect peuvent avoir été surestimés puisque ces tests sont inclus – tels quels ou dans une version modifiée – dans des batteries également listées.
Bref état des lieux en neurologie et gériatrie
Les précédents paragraphes nous indiquent que des tests validés en français existent pour l’évaluation objective des habiletés de CS en neurologie. Cependant, si l’on regarde la figure 1 avec attention, la faible utilisation de ces différents tests surprend. Elle surprend d’autant que la CS est un élément essentiel de notre cognition, jouant un rôle critique dans nos comportementaux quotidiens. Plus précisément, seuls 15,5 % des neuropsychologues en neurologie et 4,1 % en gériatrie déclarent utiliser un test de CS sur une base journalière ou fréquente [11]. À titre de comparaison, cette proportion est de 57 % en psychiatrie. Ce très faible pourcentage d’utilisation nous montre qu’il existe une marge de progression considérable pour mettre ce domaine cognitif au même niveau d’importance que les domaines traditionnels (e.g. mémoire, langage, fonctions visuo-spatiales) dans nos pratiques, notamment en neurologie et surtout en gériatrie.
Différences interindividuelles
Dans le champ de la santé mentale, l’importance des déterminants sociaux (conditions matérielles et sociales de naissance, de vie, de travail, etc.) ne devrait jamais être négligée. Ceci est particulièrement vrai dans le domaine de la CS.
À titre d’exemple, l’exposition à des événements de vie difficiles ou traumatiques peut notamment façonner le fonctionnement émotionnel, que ce soit directement (en amoindrissant les capacités de régulation émotionnelle) ou indirectement (en causant un trouble anxiodépressif dont l’expression pourrait biaiser l’inférence des états émotionnels d’autrui) [4]. Dans l’idéal, une prise en compte des aspects psychosociaux serait essentielle – si elle est menée de manière sobre et délicate – pour bien caractériser les atypies ou troubles de la CS ou du comportement social.
A minima, la comparaison entre l’état antérieur des patients et leur état actuel dans l’anamnèse est incontournable, même si celle-ci est dépendante de la présence d’une personne bien informée sur ces deux aspects. On peut également noter la présence de variations culturelles dans les mesures de CS consensuelles qui nous amènent à relativiser l’intérêt de l’utilisation de ces outils
–validés dans des pays riches, occidentaux et avec des populations blanches diplômées – auprès de populations qui ne correspondent pas à ces critères [13].
Enfin, on ne peut évoquer les différences interindividuelles que par leur potentiel impact négatif, puisque la présence d’atypies ou de troubles de la CS installés de longue date peut entraîner – lorsque d’autres fonctions cognitives efficientes ou un niveau éducatif ou intellectuel supérieur le permettent – des mécanismes de compensation. Encore peu décrits, ces mécanismes favoriseraient les adaptations comportementales (ex. se pousser à observer le regard de l’autre pour normaliser l’interaction sociale) qui pourraient amener une performance qualitativement différente de celle attendue, sans toutefois que l’aspect de quantité en soit perturbé.
Bases neurales
La multitude des processus impliqués dans la CS rend difficile l’identification des régions cérébrales qui n’auraient aucun rôle dans ce domaine. Certaines régions ont néanmoins été bien plus fréquemment identifiées comme y jouant un rôle important. D’une vision localisationniste qui a donné au lobe frontal une importance démesurée, nous sommes ensuite passés à une approche post-localisationniste qui a souvent prôné – à tort – l’existence d’un « cerveau social ». La littérature moderne vise davantage à intégrer ces régions identifiées au sein de réseaux de connectivité fonctionnelle [14]. Les trois réseaux fonctionnels illustrés dans la figure 2 ont une importance centrale dans les différents mécanismes de la CS. Le réseau de la saillance (« salience network ») implique l’insula, le cortex cingulaire antérieur, l’amygdale, le thalamus, l’hypothalamus et la substance grise périaqueducale. Il permet, entre autres, la redirection de l’attention vers des stimuli personnellement saillants, au regard de la survie, la sécurité, ou la satisfaction, et l’évaluation des renforçateurs via l’intégration des signaux intéroceptifs. Le réseau du mode par défaut (« default mode network ») reflète les activités cognitives liées à la projection mentale et la mémorisation. L’hippocampe, le cortex cingulaire postérieur (et le précuneus), le lobule pariétal inférieur, le cortex préfrontal médian et la jonction temporopariétale sont impliqués dans la production d’interprétations sociales et d’inférences fondées sur les expériences antérieures. Le réseau limbique (« semantic appraisal » ou « limbic network ») implique le lobe temporal antérieur, le cortex orbito-frontal, le striatum, l’amygdale et certains noyaux cérébelleux. Il permet le stockage et la récupération d’informations sémantiques et l’évaluation personnelle de ces informations, via une analyse hédonique.
Figure 2 – Réseaux de connectivité fonctionnelle ayant un rôle prépondérant dans les mécanismes de la cognition sociale.
Cognition sociale, syndrome frontal, syndrome dysexécutif
La CS se caractérise par une indépendance théorique stricte vis-à-vis des fonctions exécutives. Il existe également une indépendance relative fonctionnelle forte entre ces deux domaines (la dysfonction de l’un n’ayant pas nécessairement une incidence sur l’autre). Les bases neurales de la CS sont en outre largement distribuées dans le cerveau, à travers trois réseaux fonctionnels principaux, et au-delà.
Ces deux points importants amènent à critiquer certaines formulations modernes du « syndrome frontal » et du syndrome dysexécutif, deux notions auxquelles les neurologues se réfèrent régulièrement. Dans une acception large, ils impliqueraient tous deux des comportements antisociaux, un émoussement affectif, un repli sur soi et, plus généralement, des troubles des interactions sociales. Ce dossier apporte de nombreux éléments montrant que :
(1) le comportement ne peut être associé uniquement au lobe frontal, puisque les régions insulaires, temporales, striatales, pariétales et cérébelleuses – pour ne citer qu’elles – sont impliquées de manière essentielle dans ce dernier. Le titre de nombreuses échelles de comportement, souvent incluant le mot clé « frontal » est donc trompeur, et fondé sur une notion dépassée ;
(2) les dysfonctions exécutives ne peuvent expliquer à elles seules les troubles du comportement observés chez les patients, dans lesquels les troubles de la CS et affective peuvent y tenir un rôle prépondérant [1,11,14].
La cognition sociale dans les maladies neurodégénératives
Dégénérescences lobaires fronto-temporales (DLFT)
Les DLFT impliquent une atrophie progressive des lobes frontaux, temporaux et de l’insula. Elles sont caractérisées par un entremêlement de phénotypes cliniques différents, à prédominance cognitive ou motrice, sous-tendus par une grande variété de lésions neuropathologiques. Une part importante des DLFT est d’origine génétique, avec là encore une grande complexité : des mutations sur une vingtaine de gènes peuvent provoquer une DLFT.
DFTc
Dans ce large spectre, la DFTc est souvent considérée comme le prototype d’atteinte du comportement social et de la CS [15]. Deux des critères diagnostiques renvoient directement à la CS :
(1) une désinhibition comportementale marquée par des comportements sociaux inappropriés, une perte des convenances sociales, une impulsivité ou des actions irréfléchies ; et
(2) une diminution des réponses aux besoins ou aux sentiments des autres, une froideur, une réduction des intérêts sociaux et des relations interpersonnelles. Dans les critères de la DFTc prodromale proposés récemment [16], on retrouve la désinhibition comportementale, l’irritabilité, le manque d’empathie, une jovialité excessive ainsi que la nécessité d’objectiver un trouble de la CS par une mesure standardisée, soit une diminution de la sensibilité émotionnelle ou une réduction de la compréhension (ou de la connaissance) des attentes sociales. Par rapport aux autres maladies dégénératives, de nombreuses études ont montré un déficit paroxystique de la CS dans la DFTc, marqué notamment par un trouble de la reconnaissance des émotions, des aspects langagiers sociaux (e.g. sarcasmes, humour…), de la mentalisation, du jugement moral… Ces altérations sont souvent envisagées comme des marqueurs du diagnostic différentiel avec la MA, le principal diagnostic différentiel de la DFTc (on retrouve dans les deux maladies des altérations mnésiques et exécutives).
Aphasies progressives primaires
Dans la variante sémantique des aphasies progressives primaires (APPs ou démence sémantique), prototype de la désintégration de la mémoire sémantique, on retrouve également des anomalies du comportement social et de la CS. Il est souvent envisagé que les formes présentant une atrophie plus sévère à droite, et notamment temporale, expriment davantage ces symptômes. Des altérations sociales et comportementales sont néanmoins observées indépendamment de la latéralité de l’atrophie. En ce qui concerne la CS, on observe surtout un trouble de la reconnaissance des émotions, et une perte de la sémantique sociale, ces deux aspects étant entremêlés [17], ainsi qu’une réduction de l’empathie.
L’atteinte langagière de la variante non-fluente des aphasies progressives primaires (APPnf), tout comme la perturbation des capacités d’attention et des mécanismes perceptifs, semble jouer un rôle important dans l’expression des troubles de la CS dans cette maladie, même si cela ne semble toutefois pas les expliquer dans leur globalité [17]. Ces troubles sont marqués principalement par un trouble de reconnaissance des émotions et une diminution variable de l’empathie, mais les études ayant exploré ce domaine et impliqué d’autres mesures sont rares.
Outre les variantes cognitives et comportementales des DLFT citées plus haut, les altérations de la CS sont également observées dans les formes motrices, même si les études restent rares ; l’atteinte motrice prépondérante ayant amené les équipes de recherche à négliger l’atteinte cognitive dans ces maladies.
Paralysie supranucléaire progressive
Dans la paralysie supranucléaire progressive (PSP), au-delà des troubles psycho-comportementaux fréquemment retrouvés (dépression, apathie et affect pseudobulbaire – voir encadré 1), on retrouve des signes de désinhibition comportementale pouvant mener à des comportements embarrassants et inappropriés socialement. Les patients peuvent présenter une indifférence sociale, une réduction de l’empathie, ainsi qu’un manque de lucidité sur leurs propres capacités cognitives. En neuropsychologie, on peut fréquemment observer un déficit de reconnaissance des émotions visuelles et vocales, une réduction de la capacité à détecter des sarcasmes ou des mensonges et, plus généralement, une difficulté à la mentalisation. Ces difficultés peuvent être d’une intensité identique à celles observées dans la DFTc. Chez les patients qui répondent à la fois aux critères de PSP et de bvFTD (DFT-PSP), ces déficits peuvent être majorés.
Dégénérescence cortico-basale
Dans la dégénérescence cortico-basale (DCB), une atteinte cognitive et comportementale multidimensionnelle variable est retrouvée, certaines formes semblent s’exprimer majoritairement par un phénotype cognitif et comportemental, reléguant les syndromes moteurs au second plan. Dans la DCB, des troubles du comportement social et de la CS similaires à ceux de la DFTc peuvent être présents, mais les études sont – là aussi – rares. Sur le versant expressif, on peut parfois observer une apraxie faciale et un discours aprosodique, rendant l’expression des émotions difficiles. La reconnaissance des émotions peut être perturbée, tout comme l’empathie, et la conscience des troubles.
Sclérose latérale amyotrophique
Dans la sclérose latérale amyotrophique (SLA), pathologie associée aux DLFT dans 10 % des cas, mais qui peut exister de façon indépendante, les troubles comportementaux semblent moins proéminents, mais les études manquent encore pour caractériser leur sévérité et leur fréquence. Cependant, chez certains patients, on peut observer des troubles similaires à ceux constatés dans la DFTc : comportements inappropriés, moins de retenue sociale, perte des convenances, moins d’attention à l’hygiène personnelle, perte d’empathie, etc. Ces troubles du comportement peuvent être dus à l’avancée de la maladie ou bien liés à ou aggravés par d’autres facteurs tels que les difficultés à respirer (et la baisse d’oxygène associée) ou le manque de sommeil. Comme dans la PSP, on peut observer, de manière assez isolée, un affect pseudobulbaire, lequel peut entraîner un retrait social. Sur le plan neuropsychologique, on observe également une baisse significative des performances de reconnaissance des émotions et de la mentalisation, difficultés souvent mises en lien avec l’atteinte cognitive exécutive ou globale. Si les déficits en CS doivent de toute façon être considérés comme une caractéristique du phénotype cognitif de la SLA, ceux-ci semblent systématiques en cas de formes mixtes SLA-DFT, lorsque les patients répondent à la fois aux critères de DFTc et de SLA.
Maladie d’Alzheimer (MA)
Les syndromes comportementaux de la MA typique (MA), outre l’apathie et l’irritabilité, incluent fréquemment une diminution des activités sociales, un repli sur soi, et un moindre degré d’ouverture vers les autres. Ces troubles sont modulés par la qualité du sommeil, et la sévérité de l’anxiété et des syndromes dépressifs éventuels. Sur le plan neuropsychologique, on retrouve en début de maladie une préservation des fonctions traditionnelles de la CS, avec néanmoins la présence d’altération dont la sévérité est fonction de l’évolution de la maladie. Ainsi, les patients peuvent avoir des difficultés plus ou moins sévères à reconnaître les émotions faciales ou vocales. Les capacités de mentalisation, qui semblent relativement préservées en début de maladie, sont vite perturbées, en partie par l’effet des troubles cognitifs généraux (e.g. mnésiques, exécutifs) qui rendent la projection ou l’inférence difficiles. Enfin, de récents travaux tendent à montrer que lorsqu’elles et ils sont confrontés à des prises de décisions sociales financières, les patients avec MA pourraient avoir tendance à donner trop d’argent à autrui, ce qui implique de rester attentif à la vulnérabilité de ces personnes en consultation, notamment vis-à-vis des ventes forcées ou du démarchage abusif.
Aphasie primaire progressive logopénique
Relevant quasi exclusivement d’une neuropathologie de type MA, et caractérisée par des troubles du langage, l’aphasie primaire progressive logopénique (APPl) n’a été que peu étudiée sur les plans comportementaux et cognitifs sociaux [17]. Dans la littérature, les résultats y sont donc plus contrastés que pour les maladies citées plus haut. Des troubles de la perception prosodique ont néanmoins été observés, ainsi que des difficultés subnormales ou modérées à reconnaître les émotions faciales.
Atrophie corticale postérieure
Faute de données, il est difficile de de statuer sur l’existence et la sévérité des troubles du comportement social et de la CS dans l’atrophie corticale postérieure (ACP), une variante de la MA caractérisée notamment par des troubles visuo-spatiaux, praxiques et une acalculie. Quelques cas cliniques publiés laissent cependant entendre des performances normales en mentalisation.
Variante comportementale et dysexécutive de maladie d’Alzheimer
Plus rare, la variante comportementale et dysexécutive de la maladie d’Alzheimer (MAdc) implique un phénotype proche de celui de la DFTc, notamment en ce qui concerne les troubles comportementaux et leur incidence sociale. Si les études focalisées sur la CS restent rares, on note des performances similaires à celles observées dans la DFTc, avec notamment une baisse de l’empathie, des capacités de mentalisation et de la reconnaissance des émotions.
Alpha-synucléinopathies
Du côté des alpha-synucléinopathies, on peut retrouver des anomalies du comportement social et de la CS dans la maladie de Parkinson idiopathique (MPI). Notamment, l’irritabilité ou l’agressivité peuvent être observées. L’apathie est un symptôme cardinal de la MPI et peut entraîner un désintérêt social, un repli sur soi, un émoussement affectif. Hypersexualité, achats compulsifs, négligence des activités sociales au profit de nouvelles activités personnelles, comportements à risque (malgré les mises en garde des proches) et tendance au jeu pathologique peuvent également apparaître en cas de syndrome hyperdopaminergique. Sur le plan neuropsychologique, on observe des difficultés modérées, mais significatives, à reconnaître les émotions faciales et vocales, et des troubles de la mentalisation, en lien avec le niveau cognitif global, même si ces troubles peuvent apparaître en début de maladie, bien avant la démence. De récentes études suggèrent également la présence d’une dégradation des connaissances sociales.
Dans la maladie à corps de Lewy diffus (MCLD), l’apathie fréquente peut entraîner un repli social et une perte d’intérêt envers les autres. L’anxiété peut entraîner une certaine dépendance à la présence d’un proche. Une irritabilité, voire une agressivité, peut être présente. Enfin, des idées délirantes, telles qu’un syndrome de Capgras (penser que sa compagne ou son compagnon est remplacé.e par un.e imposteur.ice identique) ou des éléments paranoïaques peuvent s’observer : méfiance infondée et exagérée envers les autres, suspicion qu’on leur cache ou vole des objets, ou que les aliments ou médicaments peuvent être empoisonnés, etc. Peu d’études ont été conduites concernant la CS. Dès le stade prodromal, on observe une réduction modérée des capacités de mentalisation. Au début de maladie, on note une préservation des capacités de reconnaissance des émotions.
Autres maladies
Dans la maladie de Huntington (MH), les troubles comportementaux et cognitifs sociaux sont bien décrits. L’apathie, le manque de conscience des troubles, l’irritabilité et une colère parfois disproportionnée, l’anxiété sociale et certaines obsessions vis-à-vis de situations sociales difficiles (e.g. injustes) sont fréquemment observés durant la progression de la maladie et associés à un déficit de régulation émotionnelle. Une désinhibition comportementale peut parfois s’observer avec l’avancée de la maladie. Sur le plan neuropsychologique, la CS est souvent marquée par des altérations primaires, indépendantes des fonctionnements exécutif et moteur, au stade « manifeste ». On note des difficultés de reconnaissance des émotions, indépendamment de la modalité, et de mentalisation, qui sont dépendantes de la sévérité de la maladie. Ces altérations peuvent néanmoins être présentes dès le stade pré-manifeste (avant l’apparition des troubles moteurs) et pourraient permettre de prédire précisément le déclin fonctionnel, contrairement aux autres fonctions cognitives.
Ces résultats sont schématisés sur le tableau 2, représentant l’intensité de la sévérité des troubles de la CS chez les différents phénotypes mentionnés. Bien évidemment, cette revue n’est pas exhaustive puisque d’autres maladies neurodégénératives, plus rares, comme les ataxies spinocérébelleuses – dont l’ataxie de Friedreich – peuvent être concernées par de significatives modifications de la CS, nous indiquant que le cervelet est une région incontournable dans notre compréhension de la cognition, sous toutes ses formes.
Conclusion
La CS est un domaine central de la cognition, fondamental pour les comportements et les relations interpersonnelles. Considérant son importance, la richesse de ses processus et bases neurales, ainsi que le nombre de maladies concernées par ses troubles, l’évaluation de ce domaine est essentielle en neurologie et devrait être systématisée. Au-delà de son intérêt dans le diagnostic et le suivi des maladies, la CS peut servir d’indicateur :
- de l’engagement des patients dans le parcours de soin (y compris au sujet des décisions de fin de vie),
- de qualité de vie,
- de communication avec le personnel soignant, ou
- du soutien affectif pouvant être reçu de leurs proches – et de leurs difficultés.
Au niveau international, des initiatives clés s’amorcent pour identifier les tests les plus consensuels et établir des recommandations, en contexte d’évaluation des maladies neurocognitives en consultation mémoire (SIGNATURE initiative, visant l’harmonisation des pratiques d’évaluation neuropsychologique européennes), ou dans un but de distinction entre maladies neurologiques et psychiatriques (Neuropsychiatric Internatio nal Consortium – Frontotemporal Dementia). Au niveau national, de nombreux outils existent, qu’ils aient été développés en France ou traduits et validés en français.
L’auteur déclare qu’il est l’auteur principal de la mini-SEA, citée comme un outil d’évaluation dans ce dossier et qu’il perçoit, à ce titre, des droits d’auteur.
Correspondance
Maxime Bertoux
CMRR, Neurologie, Hôpital Roger Salengro,
1 rue Emile Laine, 59037 Lille Cedex
Email : maxime.bertoux@inserm.fr
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